Dossier de synthèse
L'inaptitude au travail du salarié
Sommaire
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3. Comment peut-on rompre le contrat de travail en cas d'inaptitude du salarié ?
3. 1. Comment un salarié déclaré inapte peut-il être licencié ?
Si l'employeur démontre la recherche effective d'un reclassement du salarié selon les préconisations du médecin du travail et l'impossibilité de celui-ci, il lui revient de procéder au licenciement.
L'employeur doit prouver la réalité de ses recherches même lorsque l'avis d'inaptitude est un avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise ! Il doit aussi prouver l'absence de poste disponible de reclassement (Cass. soc., 20 oct. 1993, no90-41.661).
Par ailleurs, les juges de la Cour de cassation estime que l'inaptitude ne peut être constatée en une seule visite médicale de reprise qu'à la condition que le médecin du travail mentionne dans son avis d'inaptitude un danger immédiat pour la santé du salarié. A défaut le licenciement pour inaptitude est nul (Cass. soc, 21 septembre 2011, n° 10-15871).
Dans l'hypothèse où le salarié fait l'objet de plusieurs déclarations d'inaptitudes, l'employeur est tenu de faire des propositions de reclassement au salarié après chaque déclaration d'inaptitude délivrée par le medecin du travail (Cass. soc.,21 sept. 2011, no 10-13.403.).
A noter que l'employeur n'est pas dispensé de son obligation de reclassement parce qu'un salarié est déclaré inapte à tout emploi dans l'entreprise. En d'autres termes, l'obligation de reclassement s'applique même en cas d'inaptitude à tout emploi de l'entreprise.
Ainsi, même en cas d'inaptitude définitive à tout poste dans l'entreprise, l'employeur doit indiquer dans la lettre de licenciement non seulement cette inaptitude, mais aussi les motifs qui empêchent le reclassement du salarié. En effet, la simple précision de l'inaptitude physique dans la lettre de licenciement, sans l'indication de l'impossibilité de reclassement ne constitue pas l'énoncé valable d'un motif de licenciement (Cass. soc., 9 avr. 2008, no04-40.356).
Lorsque l'inaptitude ne résulte pas d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, la procédure normale de licenciement doit être respectée. Le salarié a droit à l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. Mais le préavis ne pouvant pas être réalisé, l'indemnité compensatrice n'a pas à lui être versée (Cass. soc., 17 janv. 2006, no03-48.262). De plus, la rupture du contrat de travail du salarié licencié pour inaptitude physique non professionnelle prend effet dès la notification du licenciement et pas au terme du préavis que le salarié ne peut, en tout état de cause, pas exécuter (apport de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 ).
Lorsque l'inaptitude trouve sa source dans un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur doit respecter la procédure de licenciement et verser au salarié une indemnité de licenciement quelle que soit son ancienneté. Cette indemnité représente le double de l'indemnité légale et non le double de l'indemnité conventionnelle (Cass. soc., 25 mars 2009, n°07-41.708). L'ancienneté du salarié sert à calculer le montant de l'indemnité compensatrice de préavis. La Cour de cassation a récemment précisé que la période de suspension du contrat résultant de l'accident de travail doit être prise en compte dans l'ancienneté du salarié, et ce, jusqu'à la visite de reprise même si le salarié a été déclaré auparavant consolidé de son accident par la CPAM (Cass. soc., 14 décembre 2011, n° 10-20561, Sté Keroler c/ Douasbin.).
Le salarié inapte qui n'a pas fait l'objet d'un reclassement ou d'un licenciement à l'issue d'un délai d'un mois, à compter de la date de l'examen médical, se verra verser par l'employeur le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension. Ce délai d'un mois court à compter de l'avis d'inaptitude du salarié émis par le Médecin du Travail lors de la visite médicale de reprise. Le salarié est en droit de percevoir son salaire comme s'il travaillait dès l'expiration du délai d'un mois à compter de l'avis d'inaptitude. Cette solution a été rappelée par un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation en date du 12 octobre 2011 ( n° 10-15258).
L'employeur est donc tenu de verser la rémunération du salarié tant que ce dernier n'aura pas été réintégré dans l'entreprise ou, à défaut, licencié.
La Cour de cassation a précisé par un arrêt en date du 23 mars 2011 (N° pourvoi: 10-10896) que seule la notification du licenciement (et non, comme le faisant soutenir l'employeur, la convocation à un entretien préalable) interrompt le délai d'un mois: "Mais attendu que (...), lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel, qui a constaté que la deuxième visite de reprise avait eu lieu le 30 mai 2007, a condamné l'employeur au paiement des salaires à compter du 1er juillet 2007 (...)".
Dans le cadre d'une procédure de licenciement d'un salarié déclaré inapte, les juges sont particulièrement vigilents au respect de la procédure de licenciement. Plus spécialement, la cour de Cassation, dans un arrêt de la Chambre sociale du 21 juin 2011(N° de pourvoi 10-11690) a précisé que la participation d'un délégué du personnel aux cotés de l'employeur lors de l'entretien préalable au licenciement pouvait empêcher le salarié de s'exprimer librement (en l'espèce il existait un différend important entre le délégué du personnel et le salarié). En outre, cette participation a caractérisé un détournement par l'employeur de l'objet de cet entretien. La procédure de licenciement a donc été considérée comme irrégulière.
De plus, il est de jurisprudence constante que si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est toutefois due au salarié si le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude (Cass. Soc. 7 mars 2012, n° 10-18118).
Enfin, les règles relatives à l'entretien préalable s'appliquent de la même manière que pour tout licenciement. La Cour de Cassation a rappelé le 14 Décembre 2011 que l'entretien préalable au licenciement ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la convocation.