Dossier de synthèse
Les sanctions disciplinaires des salariés
Sommaire
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1. Le domaine des sanctions disciplinaires
1. 1. La notion de faute
Le régime du droit disciplinaire est lié à la notion de faute, au terme de l'article L.1331-1 du Code du travail. Si le fait invoqué par l'employeur n'a pas de caractère fautif, la sanction n'est pas justifiée.
La notion de faute s'apprécie au regard de la personnalité du salarié. En effet, la longue ancienneté d'un salarié ainsi que l'absence totale de sanction où de reproche antérieur doit être prise en compte pour apprécier la gravité de la faute.
Il est constant que la violation des règles de discipline et d'organisation collective du travail énoncées dans le règlement intérieur, l'absence de respect des obligations qui découlent du lien de subordination, ou encore un manquement à l'obligation générale de loyauté qui interdit au salarié de se livrer à des agissements moralement ou pénalement répréhensibles, sont autant de faits fautifs de nature à être sanctionnés.
Par exemple, dans un arrêt du 12 janvier 2010, la Cour de cassation a considéré le fait de ne pas remettre ses rapports d'activités à son employeur dans le délai imparti constituait une faute grave pouvant justifier un licenciement. Les juges ont estimé qu'en refusant de fournir à son employeur des rapports d'activité bimensuels, malgré des rappels à l'ordre qu'il avait reçus, le salarié a délibérément choisi de se soustraire au contrôle de son employeur.
Pour l'exécution défectueuse de la prestation de travail, il n'y aura faute susceptible d'être sanctionnée sur le terrain disciplinaire que si l'exécution défectueuse est due à l'abstention volontaire du salarié ou à sa mauvaise volonté délibérée (Cass. Soc., 19 juin 2002, no 00-43.602).
Concernant le dénigrement d'un employeur sur le réseau social « Facebook » par un salarié, le licenciement pour faute grave de ce dernier est justifié, dans la mesure où le dénigrement est public.
En effet, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du 19 novembre 2010, a estimé que partager sa page Facebook avec « ses amis et leurs amis » dépassait le cadre de la sphère privée.
La faute peut également s'apparenter à un acte d'insubordination, justifiant un licenciement pour faute grave.
Ainsi, un salarié au comportement général polémique, ne répondant pas à la convocation de son employeur à un entretien visant à résoudre ses problèmes relationnels, a été qualifié par les juges d'acte d'insubordination, justifiant le licenciement pour une faute. (Cass.soc.10 novembre 2010, n°09-40967). Par ailleurs, les juges ont estimé que le salarié avait refusé, à deux reprises, d'accomplir ses tâches de vérification des extincteurs et provoqué des fortes tensions dans l'entreprise. Ce comportement d'insubordination ne caractérisait certes pas une faute grave mais constituait une faute. Il a donc été déduit de ces faits que le licenciement n'était pas dépourvu de cause réelle et sérieuse (Chambre sociale de la Cour de cassation, du 11 janvier 2012, n° 10-20472).
De même, il a été jugé que le manquement au devoir de prudence d'un salarié pouvait donner lieu à une sanction disciplinaire allant jusqu'au licenciement pour faite commise dans l'exécution du contrat de travail. Cette obligation de prudence s'applique à tous les salariés. En effet, pour assurer l'effectivité de son obligation de protéger la santé et la sécurité de son personnel, l'employeur est en droit de sanctionner ces manquements, par un licenciement pour faute (Cass. soc, 4 octobre 2001, n° 10-18.862).
En revanche, les messages à caractère érotique ainsi qu'une correspondance intime entre deux salariés d'une entreprise ne permettent pas à un employeur qui en aurait pris connaissance de licencier le salarié pour faute, dès lors que les messages n'ont pas été enregistrés ni diffusés. Ainsi, le simple fait pour un salarié de détenir dans sa messagerie professionnelle des e-mails à caractère érotique n'est pas constitutif d'une faute (Cass. soc. 5 juillet 2011, n°10-17284). La Cour de cassation estime que le salarié a droit au respect de l'intimité de sa vie privée, même au temps et au lieu de travail.
De même, aucune sanction disciplinaire ne peut être retenue à l'encontre du salarié qui dénigre son employeur dans un e-mail privé adressé de sa messagerie personnelle, en dehors du temps et du lieu de travail à l'adresse personnelle d'un collègue. En effet, la Cour a jugé que ce message avait un caractère purement privé et que l'employeur ne pouvait donc pas constituer un manquement à l'obligation de loyauté du salarié envers son employeur.(Cass. 26 janvier 2012).
Aussi, les injures à l'égard du supérieur hiérarchique ne peuvent pas systématiquement justifier un licenciement pour faute grave. En effet, la Cour de cassation a eu l'occasion de juger que, l' ancienneté du salarié (de plus de 8 ans) et le caractère isolé de l'incident reproché, font que les injures ainsi proférées ne rendent pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. En conséquence, elles ne peuvaient justifier son licenciement pour faute grave (Cass. soc. 29 février 2012, n°10-23669).